Travail de nuit : risques accrus de cancers et de maladies mentales

Posté le 28 juin 2016 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Travail de nuit : risques accrus de cancers et de maladies mentales 

Les horaires atypiques augmentent les risques de plusieurs troubles et pathologies, selon l'Anses, qui appelle à la protection de la santé des travailleurs de nuit.

Troubles du sommeil, maladies cardiovasculaires, cancers… Les salariés exposés à des horaires atypiques, en particulier au travail de nuit, paient un lourd tribut, alerte un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) rendu public ce mercredi.

3,5 millions de Français travaillent en horaires décalés, soit plus de 15 % de la population active. Les services de santé, de sécurité ou les entreprises rentabilisant leurs machines 24 heures sur 24 sont les premiers secteurs d’activité à exposer leurs salariés aux horaires décalés. Une organisation du travail qui tend à se développer et qui pourrait être favorisée par le projet de loi travail visant à « instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s », actuellement en cours d’examen au Parlement.

A la demande de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), l’Anses a évalué les risques sanitaires du travail de nuit. Une évaluation qui a duré plus de 4 ans et réuni une vingtaine d’experts. C’est la première fois que les effets sur les court et long termes sont examinés par une agence de sécurité sanitaire.

Un bilan inquiétant

« Lors du travail de nuit, il se produit une désynchronisation entre les rythmes circadiens calés sur un horaire de jour et le nouveau cycle activité-repos/veille-sommeil imposé par le travail de nuit, explique l’Anses. Cette désynchronisation est aussi favorisée par des conditions environnementales peu propices au sommeil : lumière du jour pendant le repos, température en journée plus élevée qu’habituellement la nuit, niveau de bruit plus élevé dans la journée, rythme social et obligations familiales ». Résultat : ces perturbations génèrent des risques avérés de troubles du sommeil, de somnolence et de syndrome métabolique. Elle montre également que ces professionnels ont un risque probable de cancers, de troubles cardiovasculaires comme l’infarctus du myocarde ou l’accident vasculaire cérébral (AVC) et psychiques.

Leur expertise souligne également que ces conditions de travail sont plus difficiles et comportent des contraintes plus présentes qu’en journée. « Les salariés qui travaillent la nuit sont généralement soumis à des facteurs de pénibilité physique plus nombreux, une pression temporelle plus forte (horaires, contraintes de rythmes, délais, etc), des tensions avec leurs collègues ou le public plus fréquentes », détaille l’agence, ajoutant toutefois que selon le secteur, ces effets peuvent être diminués ou amplifiés.

Minimiser l'impact du travail de nuit

Malgré ces conclusions alarmantes, l’Anses ne se prononce pas en faveur de la suppression du travail de nuit. Elle estime néanmoins que le recours à cette organisation du travail ne se justifie uniquement pour « des situations nécessitant d’assurer les services d’utilité sociale ou la continuité de l’activité économique (hôpitaux, services d’utilité publique, etc) ». Mais il est crucial de l’optimiser « afin d’en minimiser les impacts sur la vie professionnelle et personnelle ». Pour cela, elle recommande de réaliser un état des lieux des pratiques réalisées sur le terrain pour protéger la santé des travailleurs de nuit.

L’Anses préconise également d’évaluer plus précisément les conséquences du travail de nuit, ainsi que les coûts sociaux associés au recours au travail de nuit tels que les arrêts de travail ou l’absentéisme. L’Agence prévoit également de compléter son travail par un second volet concernant l’impact sanitaire lié aux autres formes d’horaires atypiques de travail.

Par Anne-Laure Lebrun  www.pourquoidocteur.fr (lire l’article original)