Prévention des risques : les défis spécifiques du recours à la main-d’œuvre étrangère

Posté le 9 janvier 2014 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Une récente étude canadienne souligne que le recours à la main-d'œuvre étrangère entraîne des défis spécifiques dans la prise en compte des mesures de santé et de sécurité au travail. Des enseignements à méditer à l'heure où de plus en plus d'entreprises recourent à des travailleurs d'origines diverses.

“Dans les sociétés qui misent sur l’embauche des travailleurs immigrants pour combler leurs besoins de main-d’œuvre, la gestion des pratiques SST en contexte de diversité ethnoculturelle devient un sujet incontournable.”

Fort de ce constat, les experts canadiens de l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) ont mené l’enquête auprès d’entreprises de moins de 50 salariés constituée à des degrés divers de travailleurs étrangers. Leur objectif : identifier l’impact de la composition ethnique sur les pratiques de prévention des risques et mettre en exergue les bonnes pratiques qui permettent de remédier aux éventuelles défaillances.


Réflexes paternalistes

Selon les données recueillies par les chercheurs, les différents types de composition ethnique de l’entreprise influent fortement sur la prise en compte des impératifs de santé et de sécurité au travail. Ils soulignent ainsi que dans les entreprises où les dirigeants et les superviseurs sont également issus de l’immigration et, plus précisément, d’un même pays, la conception de la SST est “plus paternaliste que paritaire”. Un état de fait qui “se reflète dans la composition des comités de SST où l’on retrouve essentiellement des dirigeants”. De même, dans ces entreprises, “les travailleurs immigrants accordent davantage d’importance à la manifestation de leur loyauté envers un employeur qui leur a permis de s’insérer dans le marché du travail qu’à l’adoption de comportements critiques envers leur environnement de travail.”
Des observations qui ont bien sûr des conséquences concrètes, notamment au niveau de l’analyse des risques qui se révèle souvent déficiente en raison de l’absence d’implication des travailleurs. Dans ce cas, les experts recommandent aux préventeurs d’insister sur le nécessaire respect des normes en vigueur dans le pays et de mettre en place des procédures de sensibilisation des salariés à la prévention des risques.

Le défi du multilinguisme

En revanche, les entreprises où les dirigeants et les superviseurs sont principalement d’origine canadienne tandis que les travailleurs viennent de divers pays étrangers font face à d’autres enjeux résultant au premier chef de la diversité des langues parlées dans l’entreprise.
Afin de surmonter cet obstacle, certaines entreprises ont toutefois mis en place des stratégies abouties. L’étude cite ainsi le cas d’une entreprise dans laquelle les travailleurs s’expriment dans une grande variété de langues : français, anglais, espagnol, italien, arabe et mandarin ! L’entreprise s’est donc résolue à adopter “la formule de la traduction simultanée lors de ses formations avec l’aide de trois et parfois même de quatre interprètes pour une même séance. Le temps consacré à ces formations est majeur, mais essentiel selon la direction, surtout lorsqu’il s’agit d’implanter un nouveau procédé ou d’installer une nouvelle machine”.
Autre formule, plus légère mais également efficace : le recours au mentorat et au compagnonnage pour transmettre les bonnes pratiques de SST, notamment lors de l’embauche de nouveaux salariés. Une pratique dont le succès repose sur “le jumelage les compagnons en fonction du poste occupé mais aussi de la langue maternelle”. Une solution qui a aussi le mérite de créer de la confiance, ce qui facilite aussi l’intégration des nouveaux venus.

Autant d'observations qui peuvent également nourrir la réflexion des entreprises françaises qui recourent à une main-d’œuvre non francophone.

Source (altersecurite.org)

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