Premier rapport de l’OMS sur la résistance aux antibiotiques: une menace grave d’ampleur mondiale

Posté le 7 mai 2014 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Ce nouveau rapport dresse un tableau très complet de la résistance actuelle aux antibiotiques, les données provenant de 114 pays. Il fait état de la présence d'une résistance aux antibiotiques dans toutes les régions du monde.





Communiqué de presse

30 AVRIL 2014 | GENÈVE - Un nouveau rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) – le premier portant sur la résistance aux antimicrobiens, dont la résistance aux antibiotiques, à l’échelle mondiale – révèle que cette grave menace n’est plus une prévision, mais bien une réalité dans chaque région du monde, et que tout un chacun, quels que soient son âge et son pays, peut être touché.

La résistance aux antibiotiques – lorsque l’évolution des bactéries rend les antibiotiques inefficaces chez les personnes qui en ont besoin pour traiter une infection – est désormais une grave menace pour la santé publique.

«À moins que les nombreux acteurs concernés agissent d’urgence, de manière coordonnée, le monde s’achemine vers une ère postantibiotiques, où des infections courantes et des blessures mineures qui ont été soignées depuis des décennies pourraient à nouveau tuer», déclare le Dr Keiji Fukuda, Sous-Directeur général de l’OMS pour la sécurité sanitaire.

«L’efficacité des antibiotiques est l’un des piliers de notre santé, nous permettant de vivre plus longtemps, en meilleure santé, et de bénéficier de la médecine moderne. Si nous ne prenons pas des mesures significatives pour mieux prévenir les infections mais aussi pour modifier la façon dont nous produisons, prescrivons et utilisons les antibiotiques, nous allons perdre petit à petit ces biens pour la santé publique mondiale et les conséquences seront dévastatrices.»

Principales conclusions

Le rapport, intitulé Antimicrobial resistance: global report on surveillance [(Résistance aux antimicrobiens: rapport mondial sur la surveillance), note que la résistance se rencontre pour de nombreux agents infectieux très divers, mais choisit de mettre l’accent sur la résistance aux antibiotiques de sept bactéries différentes, responsables de maladies graves courantes telles que les infections hématologiques (septicémie), les diarrhées, les pneumonies, les infections des voies urinaires et la gonorrhée.

Les résultats sont très préoccupants, témoignant de la résistance aux antibiotiques, en particulier aux antibiotiques «de dernier recours», dans toutes les régions du monde.

Les principales conclusions du rapport sont notamment les suivantes:

  • La résistance au traitement de dernier recours contre les infections potentiellement mortelles causées par une bactérie intestinale courante, Klebsiella pneumoniae, – les carbapénèmes – s’est propagée à toutes les régions du monde. Klebsiella pneumoniae, est une cause majeure d’infections nosocomiales telles que la pneumonie, les infections hématologiques ou les infections contractées par les nouveau-nés et les patients des unités de soins intensifs. Dans certains pays, du fait de la résistance, les carbapénèmes sont inefficaces chez plus de la moitié des patients traités pour des infections à Klebsiella pneumoniae.
  • La résistance à l’un des médicaments antibactériens les plus largement utilisés pour le traitement des infections des voies urinaires dues à E. coli, – les fluoroquinolones – est très largement répandue. Dans les années 1980, lorsque ces médicaments ont été introduits pour la première fois, la résistance était quasiment nulle. Aujourd’hui, dans certains pays de nombreuses parties du monde, le traitement est désormais inefficace pour plus de la moitié des patients.
  • L’échec du traitement de dernier recours contre la gonorrhée – les céphalosporines de troisième génération – a été confirmé en Afrique du Sud, en Australie, en Autriche, au Canada, en France, au Japon, en Norvège, au Royaume-Uni, en Slovénie et en Suède. Plus d’un million de personnes sont infectées par le gonocoque dans le monde chaque jour.
  • Du fait de la résistance aux antimicrobiens, les patients sont malades plus longtemps et le risque de décès augmente. On estime par exemple que chez les personnes atteintes du Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), le risque de décès est supérieur de 64% comparé au risque pour les personnes atteintes d’une forme non résistante de l’infection. La résistance augmente également le coût des soins du fait de la prolongation des séjours à l’hôpital et des soins plus intensifs requis.

Il faut faire plus d'efforts pour lutter contre ce danger

Le rapport révèle que les outils essentiels pour lutter contre la résistance aux antibiotiques – tels que des systèmes de base pour assurer le suivi et la surveillance du phénomène – sont insuffisants ou n’existent pas dans de nombreux pays. Même si certains pays ont pris des mesures importantes pour lutter contre le problème, chaque pays et chaque individu doivent faire davantage.

Parmi les autres mesures importantes à adopter figure la prévention des infections pour qu’elles n’aient pas lieu du tout – moyennant une meilleure hygiène, l’accès à l’eau potable, la lutte contre les infections nosocomiales et la vaccination – et pour réduire les besoins en antibiotiques.

L’OMS appelle aussi l’attention de tous sur la nécessité de mettre au point de nouveaux produits diagnostiques, de nouveaux antibiotiques et d’autres outils pour permettre aux professionnels de la santé de garder leur avance sur la progression des résistances.

Il donne le coup d’envoi des efforts mondiaux menés par l’OMS pour combattre la résistance aux médicaments (pharmacorésistance). Ces efforts passeront par la mise au point d’outils et de normes et l’amélioration de la collaboration dans le monde pour assurer le suivi de la pharmacorésistance, mesurer ses impacts sanitaires et économiques, et concevoir des solutions ciblées.

L'affaire de tous

Chacun peut contribuer à lutter contre la résistance en:

  • utilisant les antibiotiques uniquement lorsqu’ils sont prescrits par un médecin;
  • terminant le traitement conformément à l’ordonnance, même si l’on se sent mieux;
  • ne partageant jamais des antibiotiques avec d’autres personnes et en n’utilisant jamais les médicaments restants d’une ordonnance précédente.

Les agents de santé et les pharmaciens peuvent contribuer à lutter contre la résistance en:

  • améliorant la prévention des infections et la lutte contre celles-ci;
  • ne prescrivant et ne délivrant des antibiotiques que lorsqu’ils sont réellement nécessaires;
  • prescrivant et délivrant le médicament antibiotique adapté à la maladie.

Les responsables politiques peuvent contribuer à lutter contre la résistance en:

  • renforçant le suivi de la résistance et les capacités des laboratoires;
  • réglementant l’utilisation des médicaments et promouvant leur usage approprié.

Les responsables politiques et les fabricants peuvent contribuer à lutter contre la résistance en:

  • encourageant l’innovation et la recherche-développement de nouveaux outils;
  • favorisant la coopération et le partage des informations entre l’ensemble des acteurs concernés.

Le rapport – qui comprend également des informations sur la résistance aux médicaments permettant de traiter d’autres infections telles que le VIH, le paludisme, la tuberculose et la grippe – dresse un tableau très complet de la pharmacorésistance aujourd’hui, en intégrant des données en provenance de 114 pays.

La situation dans les différentes régions de l'OMS

Région africaine de l’OMS
Le rapport fait état de lacunes majeures dans le suivi de la résistance aux antibiotiques dans la Région africaine de l’OMS, des données n’étant rassemblées que dans un nombre limité de pays. Bien qu’il ne soit pas possible d’évaluer la véritable ampleur du problème, compte tenu du manque de données, celles dont on dispose sont inquiétantes.

Une résistance importante est constatée pour plusieurs bactéries qui se sont propagées dans les hôpitaux et les communautés. Il s’agit notamment de la forte résistance d’E. coli aux céphalosporines et fluoroquinolones de troisième génération – deux types de médicaments antibactériens essentiels et largement utilisés. Dans certaines parties de la région, jusqu’à 80% des infections à staphylocoque doré (Staphylococcus aureus ) se sont avérées résistantes à la méthicilline (SARM), ce qui signifie que le traitement par les antibiotiques classiques est inefficace.

Région OMS des Amériques
L’Organisation panaméricaine de la Santé, Bureau régional OMS des Amériques, coordonne la collecte de données sur la résistance aux antibiotiques auprès des hôpitaux et des laboratoires dans 21 pays de la région. Les résultats montrent des niveaux élevés de résistance d’E. coli aux céphalosporines et aux fluoroquinolones de troisième génération – deux types de médicaments antibactériens essentiels et fréquemment utilisés – aux Amériques.

La résistance aux céphalosporines de troisième génération de K. pneumoniae est également importante et largement répandue. Dans certains lieux, les infections à Staphilococcus aureus résistantes à la méthicilline (SARM) atteignent 90% des cas, ce qui signifie que le traitement par les antibiotiques classiques est inefficace.


Région OMS de la Méditerranée orientale
Les données présentées dans le rapport témoignent d’une résistance aux antimicrobiens largement répandue dans l’ensemble de la Région OMS de la Méditerranée orientale. En particulier, les niveaux de résistance d’E. coli aux céphalosporines et aux fluoroquinolones de troisième génération – deux types de médicaments antibactériens essentiels et fréquemment utilisés – sont élevés.

La résistance de K. pneumoniae aux céphalosporines de troisième génération est également importante et largement répandue. Dans certaines parties de la Région, plus de la moitié des infections à Staphilococcus aureus seraient résistantes à la méthicilline (SARM), ce qui signifie que le traitement par les antibiotiques classiques est inefficace. Le rapport révèle d’importantes lacunes dans le suivi de la résistance aux antibiotiques dans la région.

Le Bureau régional OMS de la Méditerranée orientale a recensé des mesures stratégiques pour lutter contre la pharmacorésistance et il aide les pays à mettre au point des politiques, des stratégies et des plans complets au niveau national.


Région européenne de l’OMS
Le rapport révèle que des niveaux élevés de résistance de K. pneumoniae aux céphalosporines de troisième génération ont été constatés dans l’ensemble de la Région européenne de l’OMS. Dans certains lieux, jusqu’à 60% des infections à Staphilococcus aureus sont résistantes à la méthicilline (SARM), ce qui signifie que le traitement par les antibiotiques classiques est inefficace.

Le rapport estime que bien que la plupart des pays de l’Union européenne disposent de systèmes nationaux ou internationaux bien établis pour assurer le suivi de la résistance aux antibiotiques, les pays d’autres parties de la Région ont besoin de toute urgence de renforcer ou de mettre en place de tels systèmes.

Le Bureau régional OMS de l’Europe et ses partenaires apportent leur appui à ces pays par l’intermédiaire du réseau de surveillance de la résistance aux antimicrobiens en Asie centrale et en Europe orientale (CAESAR) nouvellement créé. L’objectif du réseau CAESAR est d’établir un réseau de systèmes nationaux pour assurer le suivi de la résistance aux antibiotiques dans tous les pays de la Région européenne de l’OMS et recueillir des données normalisées qui permettront de comparer les informations.


Région OMS de l’Asie du Sud-Est
Les données disponibles révèlent que la résistance aux antibiotiques est un problème en rapide expansion dans la Région OMS de l’Asie du Sud-Est, qui abrite un quart de la population mondiale. Les résultats du rapport indiquent des niveaux élevés de résistance d’E. coli aux céphalosporines et aux fluoroquinolones de troisième génération – deux types de médicaments antibactériens essentiels et fréquemment utilisés – dans la Région.

La résistance aux céphalosporines de troisième génération de K. pneumoniae est également importante et largement répandue. Dans certaines parties de la Région, plus d’un quart des infections à staphylocoque doré seraient résistantes à la méthicilline (SARM), le traitement par les antibiotiques classiques étant inefficace. En 2011, les ministres de la santé de la Région ont concrétisé leur engagement à lutter contre la résistance aux médicaments dans la Déclaration de Jaïpur.

Depuis lors, la prise de conscience de la nécessité d’un suivi approprié de la résistance aux antimicrobiens a considérablement progressé, et tous les pays sont convenus de transmettre leurs informations à une base de données régionale. Le Dr Poonam Khetrapal Singh, Directeur régional de l’OMS pour l’Asie du Sud-Est, a fait de la résistance aux médicaments un domaine prioritaire pour les travaux de l’OMS dans la Région.


Région OMS du Pacifique occidental
La collaboration sur le suivi de la résistance aux antibiotiques entre les pays de la Région OMS du Pacifique occidental a été établie dans les années 1980 mais a subi des revers à la suite d’une série de situations d’urgence en début des années 2000. Toutefois, de nombreux pays de la Région disposent de systèmes nationaux de suivi de la résistance établis de longue date.

Récemment, le Bureau régional OMS du Pacifique occidental a adopté des mesures pour donner un nouvel élan à la collaboration régionale. Le rapport fait état de niveaux élevés de résistance d’E. coli aux fluoroquinolones – un type de médicament antibactérien essentiel et fréquemment utilisé – dans la Région.

La résistance de K. pneumoniae aux céphalosporines de troisième génération est également courante. Dans certaines parties de la Région, jusqu’à 80% des infections à Staphilococcus aureus sont signalées comme étant résistantes à la méthicilline (SARM), ce qui signifie que le traitement par les antibiotiques classiques est inefficace.

Source (who.int)

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