Obligation de reclassement en cas d'inaptitude : le point sur les derniers arrêts

Posté le 6 avril 2016 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Le contentieux sur l'inaptitude reste très important, notamment sur l'obligation de reclassement du salarié qui pèse sur l'employeur. Nous récapitulons les derniers arrêts rendus en la matière par la Cour de cassation. Reclassement dans un poste nécessitant une formation de base différente

La Cour de cassation rappelle que l'employeur n'est pas tenu de donner une formation de base différente de celle du salarié et relevant d'un autre métier pour le reclasser. L'employeur a pu donc refuser de reclasser une salariée, documentaliste, les postes pouvant lui être proposés nécessitant tous une formation de technicien informatique que la salariée ne possédait pas (arrêt du 16 mars 2016, n° 13-25.927).

La proposition de poste doit être précise

Ne respecte pas son obligation de reclassement d'un salarié "apte provisoire à un poste assis", l'employeur qui propose un nouveau poste sans en préciser les contraintes physiques, ni détailler si ce poste est essentiellement sédentaire ou s'il nécessite des déplacements sur le terrain pouvant être véhiculé, contrairement aux préconisations du médecin du travail. Par ailleurs, cette seule proposition de poste par l'employeur, appartenant à un groupe international de 310 000 salariés, n'était pas suffisamment précise puisqu'elle ne mentionnait ni la rémunération, ni la durée, ni les horaires de travail (arrêt du 16 mars 2016, n° 14-19.883).

Proposition d'un reclassement temporaire

Le caractère temporaire d'un poste n'interdit pas de proposer celui-ci en reclassement. Le reclassement doit être recherché parmi tous les postes disponibles dans l'entreprise y compris parmi les postes qui ne sont disponibles que temporairement (arrêt du 10 février 2016, n° 14-16.156).

S'analyse donc en une démission la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par une salariée inapte temporairement à son poste, affectée temporairement, dans le même secteur géographique que son précédent poste, conformément aux prescriptions du médecin du travail (arrêt du 16 mars 2016, n° 14-21.868).

Les propositions de reclassement ne doivent pas forcément être écrites

La Cour de cassation précise qu'une cour d'appel ne peut décider qu'un employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement, au motif que les propositions faites au salarié ne l'ont pas été par écrit. En l'espèce, plusieurs postes avaient été proposés oralement au salarié lors d'une réunion avec les délégués du personnel à laquelle il assistait. L'employeur ne pouvait donc être condamné en ajoutant à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas

(arrêt du 31 mars 2016, n° 14-28.314).

Reclassement dans le groupe

Le fait que l'employeur produise de nombreuses recherches de reclassement au sein d'autres entreprises du groupe ne suffit pas à démontrer que l'obligation de reclassement est respectée. L'employeur doit justifier qu'il a, par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail, satisfait à son obligation de reclassement au niveau du groupe (arrêt du 27 janvier 2016, n° 14-17.584). Ainsi ne justifie pas le respect de son obligation de reclassement, l'employeur qui, bien qu'il ait envoyé une lettre précisant le profil du salarié à de nombreuses sociétés du groupe et ait reçu près de 200 réponses, toutes négatives, en raison de l'absence de poste disponible et alors que le registre unique du personnel révélait que le seul poste pouvant convenir était indisponible, s'il n'a pas été recherché l'absence de possibilité de transformation du poste ou d'un aménagement du temps de travail ou n'a pas examiné la situation du siège du groupe (arrêt du 27 janvier 2016, n° 14-11.980). Ne caractérise pas non plus son impossibilité de reclasser un salarié, y compris par des mesures telles que transformations de postes ou aménagement du temps de travail, l'employeur qui a adressé un courrier au responsable carrière et emplois du groupe auquel il appartient, qui a répondu qu'aucun poste administratif n'était vacant dans les établissements du groupe et du siège (arrêt du 16 mars 2016, n° 14-15.235). En revanche, respecte son obligation de reclassement dans le groupe l'employeur qui fait de nombreuses propositions de reclassement, loyales, diversifiées et précises (arrêt du 16 mars 2016, n° 14-29.083).

Conséquence du refus d'une proposition de reclassement par le salarié

En tout état de cause, le refus par un salarié déclaré inapte à son poste d'une proposition de reclassement n'implique pas, à lui seul le respect par l'employeur de son obligation de reclassement. Il appartient à ce dernier, quelle que soit la position prise par le salarié, de tirer les conséquences de ce refus, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé au motif de l'impossibilité de reclassement (arrêt du 10 février 2016, n° 14-14.325).

Preuve de l'impossibilité de reclassement

C'est à l'employeur qui prétend s'être trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié d'en rapporter la preuve. Une cour d'appel ne peut donc condamner un salarié à rapporter la preuve de la permutabilité du personnel à l'intérieur du groupe auquel il appartient (arrêt du 16 mars 2016, n° 14-22.765).

06/04/2016 Eleonore Barriot avec Nathalie Lebreton (Actuel Editions Legislatives)