Même si ce n'est pas important, l'employeur doit réunir le CHSCT

Posté le 21 août 2013 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

chsctA partir du moment où la demande de réunion extraordinaire est faite par 2 membres du CHSCT et qu'elle est motivée, l'employeur doit organiser la réunion. Il ne peut pas leur dire que le projet dont ils veulent parler ne constitue par un projet important.

Par lettres du 18 novembre 2009 et du 29 mars 2010, deux membres de deux CHSCT de la SNCF demandent à la direction de convoquer les CHSCT en session extraordinaire sur la mise en place d'un projet nommé « Territoires de Production ».

Contestant cette demande au motif qu'il ne s'agissait pas d'un projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité, ou les conditions de travail au sens de l'article L. 4612-8 du code du travail, la SNCF saisit le tribunal de grande instance.
Remarque : cet article du code du travail nous dit que le CHSCT est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. L'existence d'un projet important permet par ailleurs au CHSCT de se faire assister par un expert (C. trav., art. L. 4614-12).
Si ce n'est pas important, on n'a pas besoin de réunion extraordinaire
Une fois jugée par le tribunal de grande instance, l'affaire arrive devant la cour d'appel de Versailles qui accueille favorablement la demande de la SNCF :
en ce qui concerne la demande de réunion extraordinaire formée le 29 mars 2010, elle est jugée tardive, puisque postérieure à la mise en œuvre du projet sur lequel devait porter la réunion.
en ce qui concerne la demande de réunion extraordinaire formée le 18 novembre 2009, elle est jugée mal fondée car il n'avait pas été prouvé que le projet constituait un projet important ayant entraîné des modifications dans les conditions de travail.
Pour la Cour de cassaion, peu importe que ça ne soit pas important
L'arrêt de la cour d'appel fait alors l'objet d'un recours en cassation. La Cour de cassation voit les choses autrement.

En effet, dès lors que la demande de réunion extraordinaire remplit les conditions légales fixées par l'article L. 4614-10 du code du travail, l'employeur est tenu d'organiser la réunion.

Or, dans notre affaire, les juges avaient bien constaté que les demandes litigieuses avaient été formées chacune par deux membres des CHSCT et étaient motivées. On n'avait donc pas se demander s'il y avait ou non projet important au regard de l'article L. 4612-8 du code du travail. Les CHSCT devaient être réunis en session extraordinaire. Le droit à consultation (C. trav., art. L. 4612-8) et le droit à un expert agréé (C. trav., art. L. 4614-12) du CHSCT sont bien subordonnés à l'existence d'un projet important, pas le droit à réunion extraordinaire.

De manière plus imagée, l'employeur ne peut donc pas dire aux représentants du personnel « c'est trop tard, j'ai déjà mis en œuvre le projet » ou encore « le projet dont vous parlez ne constitue pas, contrairement à ce que vous estimez, un projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité, ou les conditions de travail ».

C'est à notre connaissance la première fois que la Chambre sociale de la Cour de cassation a l'occasion de préciser que l'employeur n'a pas de marge de manœuvre lorsqu'il a sur son bureau une demande régulière de convocation du CHSCT en séance extraordinaire. Il y a très longtemps, la Chambre criminelle de la Cour de cassation avait eu l'occasion de décider que l'employeur ne pouvait peut se faire juge du bien-fondé de la demande de réunion extraordinaire (Cass. crim., 4 janv. 1990, n° 88-83 311).

La règle est désormais bien établie.

Source (editions-legislatives.fr)

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