La prévention des risques physiques au travail est en recul

Posté le 1 juillet 2019 | Dernière mise à jour le 5 mai 2020

La prévention des risques physiques au travail est en recul

En 2016, 48 % des employeurs ont mis en œuvre des mesures de prévention des risques physiques au cours des 12 derniers mois, soit 9 points de moins qu’en 2013, constate le service statistiques du ministère du Travail (Dares). Cette baisse est encore plus forte au sein des TPE de moins de 11 salariés, qui ne sont en outre que 38% à disposer d'un document unique d'évaluation des risques à jour.

Mardi 25 juin à Paris, l'équipe du service statistiques du ministère du Travail (Dares) a présenté à la presse les résultats de sa dernière enquête triennale sur la prévention des risques professionnels (*). Les salariés des petites entreprises apparaissent les moins bien lotis.


Le document intègre davantage les risques psychosociaux


Depuis 2001, tout employeur est tenu d'élaborer, et d'actualiser chaque année, un document unique d'évaluation des risques (DUER) identifiant les risques encourus par les salariés sur leur lieu de travail. Si cette obligation légale n'est donc pas nouvelle, les entreprises rechignent à s'y conformer (seulement 45% des employeurs interrogés déclarent avoir un DUER à jour). La difficulté se concentre principalement dans les établissements de moins de 50 salariés, surtout les TPE. Parmi les établissements de moins de 10 salariés du secteur privé, qui représentent les trois quarts des établissements et emploient 17% des salariés, seulement 38% ont un DUER actualisé. "On sait que les employeurs de parfois deux ou trois salariés n'ont pas le réflexe de formaliser l'évaluation des risques, commente Thomas Coutrot pour la Dares. Il n'en reste pas moins que ces derniers ont tendance à minorer l'existence d'un risque chimique". Dans les établissements de 50 salariés ou plus du secteur privé "où les CHSCT sont obligatoires", souligne la Dares, plus de 90% des employeurs ont actualisé le DUER dans les 12 derniers mois. L'obligation légale de mettre à jour le DUER après chaque accident du travail apparaît respectée.

S'agissant du contenu du document unique, le ministère du Travail constate qu'il intègre plus fréquemment la question des risques psychosociaux (dans près de 40% des cas en 2016, contre 30% en 2013). "Cette augmentation intervient dans tous les secteurs d'activité et toutes les tailles d'établissement, y compris dans les établissements du secteur privé de moins de 10 salariés où cette proportion passe de 22% à 30% en trois ans", relève l'étude.
 

Etablissements ayant élaboré ou mis à jour leur DUER au cours des 12 derniers mois
(Dares)

 

Le ministère du Travail relève que les changements organisationnels importants (restructuration, changement d'équipe de direction, déménagement) "contribuent très vraisemblablement à l'exposition des salariés aux risques psychosociaux". Les directions qui signalent de tels changement déclarent deux fois plus souvent avoir des salariés exposés aux risques psychosociaux.


Recul de la prévention des risques physiques


La difficile généralisation du document unique s'accompagne d'un recul significatif des actions de prévention des risques physiques au travail. "En 2016, 48 % des employeurs ont mis en œuvre des mesures de prévention des risques physiques au cours des 12 derniers mois, soit 9 points de moins qu’en 2013", commente la Dares. Cette baisse est plus forte encore dans les établissements de moins de 11 salariés (-12 points). "Moins d’établissements ont mis en place des actions nouvelles de prévention qu’en 2013 (37 % en 2016 contre 43 % en 2013) ou même simplement poursuivi les actions antérieures (11 % en 2016 contre 14 % en 2013), détaille Selma Amira, auteure de l'étude.

Actions de prévention contre les risques physiques dans les 12 derniers mois
(Dares)

Dans le détail, les principales actions de préventions sont les suivantes :

  • mise à disposition de nouveaux équipements de prévention individuelle (17%) ;
  • développement de la formation à la sécurité du personnel (16,5%) ;
  • modification des locaux de travail, des équipements ou des produits utilisés (14,9%) ;
  • modification de l'organisation (8,9%) ;
  • élaboration d'un nouveau plan de prévention (7,8%) ;
  • recours à un expert extérieur (3,7%).

Il est à noter que 7% des entreprises ont initié des actions de prévention des risques non professionnels, par exemple des cours de nutrition ou une aide pour arrêter de fumer.


Les mesures de prévention se concentrent là où est identifié le risque


Le ministère du Travail relativise ce mauvais résultat en rappelant que "la prévention suit le risque. Le principe de réalité s'impose". En effet, lorsque les employeurs estiment que leurs salariés sont exposés à des risques professionnels physiques ou psychosociaux, ils disposent beaucoup plus souvent d’un document unique d’évaluation des risques actualisé. "Quand des salariés sont exposés à des RPS (risques psychosociaux), le DUER intègre plus souvent ces risques, sans doute parce que ces derniers font aussi souvent l’objet de propositions des représentants du personnel sur les conditions de travail", analyse la Dares. Dans le privé les substitutions de produits ou d’équipements dangereux par des équipements ou produits moins dangereux ont été plus de quatre fois plus fréquentes dans les établissements déclarant plus de 10 % de salariés exposés à des risques physiques, et encore deux fois plus fréquentes quand il y a eu des accidents du travail dans l’établissement l’année précédant l’enquête, est-il illustré.
 

Expositions aux risques et prévention en 2013 et 2016

(*) L'enquête sur les conditions de travail et les risques psychosociaux interroge les responsables d'établissements sur les politiques managériales en matière de conditions, d'organisation du travail et de prévention des risques professionnels. Elle est déclinée en trois modèles afin d'interroger spécifiquement le secteur marchand associatif, le secteur hospitalier et le reste de la fonction publique. L'analyse de la Dares se fonde sur les réponses de 14 200 établissements en 2013 et 13 400 établissements en 2016.