[Avis d’expert] "Burn out, bore out, la prévention protège salariés comme employeurs"

Posté le 22 juin 2016 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

 

La Cour de cassation a récemment modifié sa position sur la responsabilité de l’employeur en matière de santé et sécurité. Pour Me Dhiana Badji, avocate au cabinet Jeantet, s’il est soumis à des obligations, l’employeur dispose également de moyens.

[Avis d’expert] Burn out, bore out, la prévention protège salariés comme employeurs

Me Dhiana Badji, du cabinet d’avocats Jeantet, a répondu vendredi 10 juin aux questions des internautes sur les obligations de l’employeur en matière de prévention du stress. Vous pouvez retrouver le contenu du tchat ici.

La santé et la sécurité sont des enjeux essentiels dans le monde du travail, et plus encore aujourd’hui face au développement des nouvelles technologies et des moyens de communication et à la montée en puissance de la notion de « qualité de vie au travail ».L’employeur, qui est tenu d’assurer la santé physique et mentale de ses salariés, est soumis à cet effet à un certain nombre d’obligations mais il dispose également de moyens. Concrètement, quels sont-ils ?

La Cour de cassation reconnaît depuis peu  la possibilité pour l’employeur de s’exonérer de sa responsabilité en ce qui concerne la santé et la  sécurité de ses salariés (1), mais uniquement si celui-ci a rempli toutes ses obligations en la matière.

Tout d’abord, l’employeur est tenu d’identifier et d’évaluer les risques et les facteurs de pénibilité dans son entreprise, cette démarche donnant lieu à l’élaboration d’un « document unique d’évaluation des risques » (2) qui doit être tenu à jour. A partir de ce document, il doit mettre en place un programme d’actions (3) visant à réduire ou supprimer les risques évalués, sur lequel le CHSCT est consulté chaque année. En identifiant et en évaluant les risques auxquels ses salariés sont susceptibles d’être exposés, y compris les risques psycho-sociaux, l’employeur est alors à même de prendre des mesures adéquates.

Actions de prévention, d'information, de formation

L’article L. 4121-1 du Code du travail prévoit à cet effet que l’employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment des actions de prévention des risques, des actions d’information et de formation ainsi que la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

S’agissant des outils de travail à distance, tels que l’ordinateur ou le téléphone portable, l’employeur peut par exemple mettre en place une charte de bonnes pratiques indiquant les plages horaires durant lesquelles les salariés doivent se "déconnecter" et ne devront pas être contactés par l’entreprise à l’instar de ce que prévoit la convention collective Syntec. L’employeur peut également mettre en place des formations pour les managers, afin de prévenir les cas de souffrance au travail ou encore organiser des réunions de service régulières pour faire le point sur l’environnement de travail, l’organisation des missions des uns et des autres afin de rappeler la place de chacun dans l’équipe et éviter tout isolement de salariés y compris les salariés placés en situation de télétravail.

L’employeur peut par ailleurs s’appuyer sur le "référent en santé et sécurité", dont la désignation est obligatoire dans chaque entreprise (parmi les salariés ou en externe) et qui est chargé de s'occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels dans l'entreprise.

Il est également essentiel de ne pas négliger le rôle des institutions représentatives du personnel en matière de prévention. Afin d’éviter la procédure offensive du droit d’alerte, les représentants du personnel et notamment le CHSCT doivent être associés en amont aux analyses de risques, aux enquêtes internes, à la mise en place de procédures de prévention.

Enfin, les services de santé du travail mais aussi l’inspection du travail peuvent s’avérer d’une aide précieuse, que ce soit pour veiller à la santé des salariés, conseiller l’employeur sur l’amélioration des conditions de vie et de travail dans l’entreprise ou encore révéler une situation préoccupante avant qu’elle n’ait des conséquences irréparables.

(1) Cass. soc. 1er juin 2016  n°14-19.702) - Cass. soc.25 novembre 2015 n° 14-24.444

(2) Article L. 4121-3 et R. 4121-1 à 14 du Code du travail

(3) Programme annuel de prévention et d’amélioration des risques professionnels

L’usine nouvelle (lire l’article original)