Assurances prévoyance décès : menace sur le secret médical

Posté le 8 janvier 2014 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Des assureurs voulant connaître les causes du décès du signataire demandent aux médecins de passer outre le secret médical. Le Défenseur des droits sonne l’alarme.

C’est l’histoire du pot de terre contre le pot de fer. Tout est parti de l’alerte lancée l’été dernier par Céline Cayeux, habitante de la Sarthe , dont la mère était décédée, et qui ne parvenait pas à récupérer le capital décès dont elle était bénéficiaire : refusant le certificat médical qu’elle pouvait lui fournir, pour prouver que la cause du décès de sa mère ne faisait pas partie des clauses d’exclusion du contrat, l’assureur (la Sogecap) exigeait que ce soit l’un des médecins de sa mère qui remplisse un document type très détaillé. Quitte, au passage, à oublier le sacro-saint secret médical… En se penchant sur ce cas, le Défenseur des droits a découvert que le problème de Céline concerne potentiellement un grand nombre de personnes : chaque année, selon la FFSA (fédération française des sociétés d’assurances), un quart des décès, soit près de 150000 d’entre eux, se soldent par un règlement financier lié à un contrat de prévoyance décès. En échange de leurs cotisations, le ou les souscripteurs sont assurés qu’à leur mort leurs bénéficiaires hériteront d’un capital au montant déterminé. Selon nos informations, le Défenseur des droits a alerté la ministre de la Santé et formulé plusieurs recommandations. Retour sur un dossier aussi complexe que sensible.


Un secret médical écorné ?

Lorsque le souscripteur d’un contrat de prévoyance décède, l’assureur vérifie que son décès ne justifie pas une annulation du contrat. Le hic : « La loi Kouchner sur le droit des malades a oublié de préciser quelles sont les conditions d’accès au dossier médical pour ces assurances décès », souligne Alain-Michel Ceretti, conseiller droits des malades auprès du pôle santé du Défenseur des droits. Du coup, certains assureurs vont trop loin et font pression pour que ce soient les médecins de la personne décédée qui leur transmettent directement des informations médicales. Dilemme. Ou bien ces derniers acceptent, et écornent le secret médical, valable même après la mort. Ou bien ils refusent, et le bénéficiaire ne peut faire valoir ses droits. « Nous sommes régulièrement alertés sur ce type de cas », confirme le président de l’Ordre national des médecins, le Dr Patrick Bouet. Autre problème de taille : ces documents médicaux sont parfois envoyés à l’assureur, sans que le nom de son médecin-conseil ne soit précisé. Du coup la confidentialité ne peut être respectée.


Les recommandations.

Le Défenseur demande aux assureurs « d’accepter les certificats médicaux établis par le médecin » qui a pris en charge la personne décédée, sans qu’un « modèle type » puisse lui être opposé. « Le médecin peut préciser si la mort a été naturelle, due à la maladie ou accidentelle, sans apporter de précision sur la nature de l’affection en cause », ajoute le conseil de l’ordre. Ce certificat est transmis par le médecin aux ayants droit de la personne décédée, à eux ensuite de le transmettre à l’assureur. Pour garantir la confidentialité, le courrier doit être envoyé au médecin-conseil de l’assureur, « dont le nom et prénom auront été précisés » : ce dernier « sera le seul destinataire ».


Mariés, pacsés… des bénéficiaires inégaux entre eux.

En creusant le dossier, le Défenseur des droits a découvert une grave inégalité de traitement entre bénéficiaires : si les ayants droit (enfants, parents, frères…) d’une personne décédée peuvent obtenir des informations médicales sur elle afin de faire valoir leurs droits, d’autres bénéficiaires (pacsés, amis, voire même maîtresses), pourtant très nombreux, ne peuvent y avoir accès. D’où l’impossibilité, parfois, de débloquer les sommes en jeu.


Les recommandations.

Le Défenseur demande aux assureurs « d’adapter leurs demandes de communication à la qualité du bénéficiaire et de s’en abstenir » s’il est « dans l’incapacité juridique de les obtenir lui-même ». Il recommande à la ministre de la Santé de « mener une réflexion » pour « remédier dans un délai raisonnable » à cette inégalité de traitement.

Source (leparisien.fr)

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