Alcool au travail : quels moyens d'action pour l'employeur ?

Posté le 13 juin 2014 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

L'article R 4428-20 du code du travail dispose qu'"aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail".
Nous détaillons les solutions dont dispose l'employeur confronté à l'état d'ébriété d'un salarié durant le travail.








Le règlement intérieur peut-il interdire totalement l'introduction et la consommation d'alcool dans l'entreprise ?

Selon l'article L 1321-3 du code du travail, "le règlement intérieur ne peut pas contenir de dispositions contraires aux lois et règlements". Or certaines boissons alcoolisées sont autorisées sur le lieu de travail par la législation (vin, bière cidre, poiré, article R 4428-20 du Code du travail). Il existe peu de jurisprudence en la matière, mais dans un arrêt ancien du 3 octobre 1969, la Cour de cassation a admis que l'employeur puisse totalement interdire, dans l'intérêt de l'entreprise, la présence d'alcool. Plus récemment, le Conseil d'Etat a décidé que que le règlement intérieur ne peut pas interdire purement et simplement la consommation de boissons alcoolisées dans l'entreprise en l'absence d'une situation particulière de danger ou de risque. La position des Hautes juridictions divergent donc sur ce point. Cette divergence devrait néanmoins être prochainement résolue puisque le plan gouvernemental 2013-2015 de lutte contre les drogues et les pratiques addictives prévoit de modifier l'article R.4228-20 du code du travail afin est de permettre aux employeurs d'interdire toute boisson alcoolisée dans l'entreprise.

Peut-on fouiller le vestiaire d'un salarié pour savoir s'il a introduit de l'alcool dans l'entreprise ?

Une fouille ne peut être envisagée que si elle est justifiée et qu'elle est encadrée. En effet, la Cour de cassation a précisé que l'employeur ne peut apporter aux libertés individuelles et collectives des restrictions que si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Ainsi, "l'employeur ne peut procéder à l'ouverture de l'armoire individuelle d'un salarié que dans les cas et aux conditions prévues par le règlement intérieur et en présence de l'intéressé ou celui-ci prévenu" (arrêt du 11 décembre 2001, n° 99-43.030).

Que faire face à un salarié qui souffre d'alcoolisme chronique ?

Ce problème, s'il n'a pas de répercussions directes pour l'entreprise, relève de la vie privée du salarié. Il est donc très délicat pour l'employeur d'intervenir. Il peut néanmoins proposer une consultation du médecin du travail au salarié, celui-ci étant tenu au secret professionnel.

Que faire si un salarié arrive en état d'ébriété sur son lieu de travail ?

L'article R. 4228-21 du code du travail prévoit qu'il est interdit de laisser entrer ou séjourner sur le lieu de travail des personnes en état d'ivresse. L'employeur ne doit donc pas laisser le salarié se rendre sur son poste de travail. Il doit l'inviter à rentrer chez lui, après une phase de dégrisement.

Doit-on laisser repartir un salarié venu avec son véhicule personnel ?

L'employeur ne doit pas le laisser repartir par ses propres moyens et utiliser son véhicule. Il doit le raccompagner ou le faire raccompagner à son domicile. En effet, la responsabilité de l'employeur pourrait être engagée, au titre de son obligation générale de sécurité, si le salarié était victime d'un accident sur le trajet du retour à son domicile.

L'employeur peut-il recourir à l'alcootest ?

Oui, mais ce recours ne peut pas être systématique ; il est strictement encadré (voir notamment l'arrêt du 24 février 2004, n° 01-47.000).

Il n'est possible que si :

  • le règlement intérieur le prévoit ;
  • les fonctions du salarié le justifient (manipulation de machines ou de produits dangereux, conduite de véhicules...) ;
  • le salarié doit avoir la possibilité de contester l'alcootest par un autre test ou une contre-expertise.

L'alcootest peut être effectué par l'employeur lui-même ou une personne ou un organisme désigné par l'employeur. Un tiers peut être présent lors de ce contrôle.

Quelles sont les conséquences d'un contrôle positif ?

En cas de contrôle positif, les salariés sont passibles d'une sanction disciplinaire (arrêt du 22 mai 2002, n° 99-45.878).

L'ébriété au travail peut-elle être un motif de licenciement ?

Oui, mais tout dépend des circonstances, du règlement intérieur, de la tolérance de l'employeur, du caractère isolé ou non de l'incident...
La faute grave peut même être retenue dès lors que le salarié a déjà fait l'objet d'avertissements pour ce motif et que son comportement a des répercussions sur la qualité de son travail et le fonctionnement de l'entreprise.

Source : Par Eleonore Barriot (actuel-hse.fr)

Espace CHSCT, plateforme N°1 d'information CHSCT, édité par son partenaire Travail & Facteur Humain, cabinet spécialisé en expertise CHSCT et formation CHSCT