"J'ai un job à la con" : pourquoi les Français sont malheureux au travail

Posté le 22 avril 2016 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Les Français sont parmi les plus malheureux au monde sur leur lieu de travail.

Les salariés français sont parmi les plus malheureux au travail. Une psychologue de la spécialité décrypte ce malaise et donne des pistes pour s'en sortir

Vous n'arrêtez pas de vous plaindre de votre travail ? Vous haïssez les conditions dans lesquelles vous ne parvenez pas à vous épanouir au boulot ? Sachez qu'il y a sans doute pire que vous. Dans un format complet, riche et bien édité,le site de "L'Obs" compile les témoignages de neuf salariés qui avouent occuper "un job à la con"

  

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"En moyenne, je dois travailler une heure par jour"

Des paroles de travailleurs désabusés qui décrivent leur quotidien, et leur boulot "vide de sens". Exemple avec Cloé, 30 ans, chargée de clientèle, qui passe sa journée à...regarder des séries, ce qui n'a rien de distrayant confie-t-elle. "A 10 heures ce matin, je m'ennuyais déjà. Je bosse dans une entreprise de cours à domicile. En clair, je m'occupe de placer les enseignants, et de faire le suivi avec les parents. Sauf, que je n'ai quasiment rien à faire... En moyenne, je dois travailler une heure par jour" raconte la salariée.  "Ça ne m'empêche pas dépasser les objectifs fixés. Ça paraît dingue, mais mes chefs ne réagissent pas. Ils embauchent peut-être plus que nécessaire pour anticiper les départs" ajoute-t-elle. 

Claire qui passe ses journées sur Facebook et un jour a fondu en larmes, Antoine qui écrit des dossiers qui ne seront jamais lus, ou encore Martha qui passe ses journées à ajuster les reflets sur des photos de montre de luxe en rêvant à reprendre ses études, ce sujet de l'Obs multiplie les témoignages éloquents

Les Français, les plus malheureux au travail

Publiée en mars 2016,une étude commandée par une grande marque de fournitures de bureauva dans ce sens : les Français sont parmi les travailleurs mondiaux les plus malheureux dans leur activité professionnelle. Parmi les salariés de 17 pays consultés, les Français affichent le taux de satisfaction au travail le plus bas avec seulement 5% des sondés. Très loin derrière la moyenne mondiale (13%) et surtout l'Inde, leader de l'étude avec ses 28%, leader de ce classement,partagé sur Quartz.  

Crise + incertitude = anxiété

Psychologue du travail et coach en entreprise sur Paris, Noémie Le Menn a vu s'accentuer ce sentiment de malaise au travail. "Je dirais depuis 2008 et la crise économique. Les salariés et leurs entreprises vivent davantage dans un climat d'incertitude. Cela engrange de l'anxiété, et ce n'est pas facile de se sentir bien dans son poste, quand on ne sait pas par qui on va être mangé demain" assure-t-elle. 

"C'est le moteur d'un stresschronique qui peut durer des années"

Une situation économique fragile, qui favorise ce sentiment d'incompréhension. "La certitude d'un changement prochain, cette épée de Damoclès, c'est le moteur d'un stress chronique qui peut durer des années" poursuit Noémie Le Menn. Pour qui tous les types de salariés peuvent être concernés, y compris ceux qu'on penserait mieux lotis.

"Les cadres par exemple sont très exposés, ils savent dans ces cas-là que leur poste peuvent sauter. Etre sur le gril, ça ne facilite pas leur mode de management et ne les rend pas performant. Aujourd'hui, cela développe des comportements qui accentuent le - chacun pour soi -, les salariés deviennent plus carriéristes" renchérit la psychologue, qui fait le parallèle entre milieu professionnel et politique. "L'intérêt commun est délaissé, au profit de la bataille personnelle pour sa carrière".

Des conseils pour se sentir mieux au boulot

Fort heureusement, il existe de bonnes attitudes à adopter pour mieux se sentir au travail. Noémie Le Menn en liste quelques-unes.

Retrouver le plaisir: "puisqu'on ne peut pas se projeter dans l'avenir, il faut savoir vivre l'instant T, chercher le positif, il ne faut pas broyer du noir par mécanisme. Il faut trouver des activités pour se protéger, dans les loisirs, mais aussi en milieu professionnel avec des formations, développer ses compétences". 

"On doit être son propre manager"

Restaurer la confiance: "Actuellement, les bilans de compétences sont de vrais atouts pour mesurer ce que vous avez réussi. Il faut restaurer la confiance et se projeter. En deux ans, on peut très bien rester à son poste mais devenir bilingue et se fixer des objectifs. On doit être son propre manager".

S'appuyer sur le réseau: "Au travail, il faut chercher des alliances et ne pas rester seul. Il faut arrêter de penser que toutes les personnes sont des ennemies, sinon il faut consulter ! Créer ou rejoindre un réseau, c'est salvateur. Une étude menée sur le sujet à l'Université de Harvard pendant 70 ans a prouvé que le point commun qui existait entre des personnes heureuses au travail était la qualité de leur réseau professionnel. On a intérêt à rejoindre le groupe et à être quelqu'un à l'intérieur du groupe".  

SUD OUEST 21/04/2016