Le projet de loi Travail finalise la réforme de la médecine du travail

Posté le 18 mai 2016 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

Le projet de loi El Khomri complète la réforme de la médecine du travail, entamée l'été dernier. Allégement des visites médicales, refonte des règles liées à l'inaptitude, nous faisons le point sur l'état du texte dans sa version adoptée jeudi en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

Le projet de loi El Khomri poursuit la réforme de la médecine du travail qui n'avait pas pu être menée à son terme dans le cadre de la loi Rebsamen du 17 août 2015. Entre la présentation du texte en Conseil des ministres le 24 mars dernier et son adoption jeudi après-midi à l'Assemblée nationale via la procédure du 49.3, le texte a peu évolué. Nous récapitulons les principales mesures et les dernières évolutions qui ont été introduites par le gouvernement.

Inaptitude

Harmonisation des procédures de reclassement en cas d'inaptitude

Le projet de loi Travail harmonise la procédure de reclassement, que l'inaptitude soit professionnelle ou non. Suite à une déclaration d'inaptitude, l'employeur propose un autre poste au salarié en prenant en compte les préconisations du médecin du travail. Les délégués du personnel doivent donner leur avis sur le poste de reclassement proposé par l'employeur au salarié déclaré inapte. La portée de l'obligation de reclassement suite à un avis d'inaptitude devient également identique que celle-ci soit professionnelle ou non.

Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il doit lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement

► A noter que dans le cadre de cette procédure, l'obligation pour le médecin d'indiquer la capacité du salarié à bénéficier d’une formation destinée à lui proposer un poste adapté n'est plus limitée aux entreprises d'au moins 50 salariés, dans la version du texte soumise au 49.3.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie : de son impossibilité de proposer un poste au salarié suite aux préconisations du médecin du travail, du refus par le salarié du poste proposé dans ces conditions ou de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que "tout maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise". L’obligation de reclassement incombant à l’employeur est réputée satisfaite quand celui-ci propose au salarié un poste de travail qui tient compte des indications du médecin du travail.

Un point devait évoluer mais restera finalement en l'état, à savoir la possibilité de prévoir une visite médicale pendant les périodes de suspension du contrat. Le projet de loi prévoit que l’obligation de reclassement soit proposée dès lors qu’il est constaté que le salarié est victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel, supprimant ainsi la référence à la suspension du contrat de travail.

Propositions écrites du médecin du travail

Le médecin du travail proposera toujours des mesures individuelles d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé par le salarié afin de permettre son maintien dans l'emploi. Mais celles-ci devront être établies par écrit, et après échange avec le salarié ou l'employeur. De même, l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail sera également accompagné "par des conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du travailleur". Il n'interviendra qu'après une étude de poste - déjà prévue aujourd'hui - et un échange avec l'employeur et le salarié, dès lors qu'aucune mesure d'aménagement de poste n'est possible et que l'état de santé du salarié justifie un changement de poste.

Contestation de l'avis d'inaptitude

La contestation de l'avis d'inaptitude est un autre point qui devait évoluer. Le projet de loi prévoit que la contestation de l’avis du médecin ne relèvera plus de la compétence de l'inspecteur du travail après avis du médecin inspecteur du travail, mais du conseil des prud'hommes, statuant en référé. L'employeur ou le salarié saisira le conseil d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des experts près de la cour d'appel. L'auteur de la saisine en informera le médecin du travail. Le rapporteur avait signifié son intention de faire évoluer le texte notamment au regard du faible nombre d'experts. Ce ne sera finalement pas le cas.

Visites médicales

Une visite d'information accompagnée d'une attestation

Le projet de loi remplace la visite médicale d'embauche par une simple visite d'information et de prévention qui pourra être effectuée par le médecin du travail ou par l'un des membres de l'équipe pluridisciplinaire (collaborateur médecin, infirmier...). L'objet de cette visite ne serait donc plus de vérifier l'aptitude du salarié à son poste. Le texte, dans sa dernière mouture, ajoute l'obligation de délivrer une attestation. Un décret devra fixer le délai de cette visite et un arrêté le modèle d'attestation.

Une autre modification concerne les visites médicales périodiques. Celles-ci n'auraient forcément plus lieu en principe tous les deux ans, comme actuellement, mais prendraient en compte "les conditions de travail, l'état de santé et l'âge du travailleur, ainsi que les risques professionnels auxquels il est exposé".

Un examen médical d'aptitude pour les postes à risques

Les salariés occupant un postes à risques pour la santé ou la sécurité du salarié, celles de ses collègues ou celles de tiers évoluant dans l'environnement immédiat du salarié, bénéficieront d'un suivi individuel renforcé qui comprendra notamment un examen médical d'aptitude. Réalisé avant l'embauche, il sera renouvelé périodiquement et effectué par le médecin du travail.

►La version du texte considérée comme adoptée via le 49.3 ajoute que le travailleur qui se déclare comme travailleur handicapé lors de la visite d'information et de prévention, ainsi que tout travailleur qui perçoit une pension d'invalidité, est obligatoirement orienté vers le médecin du travail pour bénéficier du suivi individuel renforcé de son état de santé.

Visite médicale des salariés en CDD, des salariés temporaires et des travailleurs de nuit

Le projet de loi prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat devra adapter les règles concernant la visite médicale d'information et de prévention et du suivi médical renforcé aux salariés temporaires et en CDD.

Florence Mehrez Actuel CE (Lire l’article original)